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On remet les gants pour le deuxième round dans le combat européen sur les brevets logiciels
dimanche 4 avril 2004
Après des mois de discussion dans le secret des coulisses, la Présidence irlandaise de l’Union européenne renvoie la proposition de directive de l’UE sur les brevets logiciels à la case « politique ». L’Irlande veut que les ministres des États membres se mettent d’accord pour que toute objection soit levée en mai. La proposition de la Présidence rejette tous les amendements du Parlement européen qui clarifient le texte et pousse au contraire à une brevetabilité directe des programmes d’ordinateur, des structures de données et des descriptions de procédés. La déléguation luxembourgeoise a fait en vain une dernière tentative pour garantir l’interopérabilité des standards brevetés, tentative rejetée. En renfort de la position du Conseil, le département brevets de Nokia récolte les signatures de cadres des plus importantes entreprises dans un « Appel à l’action » soutenant le texte de la Présidence. Dans le camp opposé, les défenseurs de la posi tion du Parlement européen ont organisé des conférences pour expliquer les dangers des brevets logciciels et se mobilisent pour une « grève en ligne » et un rassemblement à Bruxelles le 14 avril avec comme slogan : « Non aux brevets logiciels — Le pouvoir au Parlement ». Ils espèrent récidiver avec le même impact que des actions similaires avaient eu en septembre 2003, contribuant à convaincre le Parlement européen de voter clairement contre la brevetabilité des logiciels.
- Les brevets logiciels reviennent sur la scène politique de (...)
- « Appel à l’action » du département brevets de Nokia
- Réactions des parlementaires européens à la position du Groupe de (...)
- Le texte de la Présidence rejette l’interopérabilité
- Grève en ligne, rassemblements, conférences
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Les brevets logiciels reviennent sur la scène politique de l’UE
Après des mois de planque dans le maquis bruxellois, la discussion à prpopos de la très controversée Directive européenne sur les brevets logiciels revient à nouveau dans les hautes sphères politiques. Mardi 6 avril, la Présidence irlandaise de l’UE a soumis la question au comité des représentants permanents (CoRePer) des États membres, le lieu habituel pour les maquignonnages compliqués.
voir aussi Council Working Party « compromises » on extreme pro-patent position
En réaction, les partisans pro et anti brevets logiciels mobilisent leurs troupes pour soutenir respectivement le Conseil ou le Parlement. Les supporters du Parlement ont annoncé une journée de grande action à Bruxelles, mercredi 14 avril, culminant avec une conférence de haut niveau dans les bâtiments mêmes du Parlement européen. De plus, ils encouragent leurs sympathisants à entâmer « une grève en ligne » la semaine prochaine, en mettant en deuil leur sites web pour « démontrer les conséquences des brevets logiciels avant qu’il ne soit trop tard ».
La décision de la Présidence irlandaise de soumettre le dossier est inattendue mais marque un retour significatif du sujet sur la scène politique.
D’après une source proche de la position de la Présidence, « de nets progrès ont été accomplis par le Groupe de travail concernant des problèmes que les États membres avaient eus sur des questions spécifiques de formulation mais il reste des différences significatives entre les États membres sur certains points clés. Le sentiment général est que le travail au niveau etchnique est allé aussi loin que possible et qu’un apport important au niveau politique est maintenant nécessaire si l’on veut arriver à un accord global en mai ».
Les États membres devraient fixer une position commune lors d’une réunion du Conseil des ministres à la concurrence devant avoir lieu à Bruxelles les 17 ou 18 mai.
« Appel à l’action » du département brevets de Nokia
Les lobbyistes pro-brevets logiciels se préparent au combat. La FFII a obtenu une copie d’une circulaire diffusée par Tim Frain (Nokia/Southwood) et Dany Ducoulombier (Nokia/Bruxelles) (voir Nokia and Software Patents) pour obtenir des signatures pro-brevets avant le 8 avril. La lettre appelle les ministres à lever leurs objections et à supporter un document de travail émis par la Présidence irlandaise le 17 mars.
« Tous les innovateurs européens, comprenant des inventeurs particuliers, de petites et moyennes enterprises (PME) mais aussi de grosses entreprises multinationales, réclament des brevets pour protéger leurs inventions, encourager la recherche et le développpement en Europe et promouvoir les transferts de licences et de technoloqies », affirme la lettre.
« Nokia semble ne pas compter Opera dans les innovateurs européens », commente Håkon Wium Lie, PDG d’Opera Software Inc, un leader innovant sur le marché des navigateurs internet et fournisseur d’une grande partie du logiciel utilisé dans les téléphones mobiles Nokia.
Et, comme l’explique Hartmut Pilch, président de la FFII et porte-parole de l’Alliance Eurolinux Alliance, Opera n’est qu’une entreprise européenne innovante parmis les milliers qui ont soutenu nos pétitions contre les brevets logiciels.
Pilch poursuit :
L’affirmation du département des brevets de Nokia comme quoi les brevets sont nécessaires pour financer la recherche dans le secteur informatique ressmble à une tentative désespérée pour réveiller les fausses idées que se font ceux qui connaisent mal le domaine des TIC. Toutes les études économiques que nous connaissons, y compris celles commandées par la Commission européenne et les gouvernements des États membres, ont montré que les brevets logiciels ne sont qu’un moyen de second ordre pour sécuriser les investissements dans la recherche et le développement. Les principaux facteurs donnant un avantage compétifif sont les droits d’auteurs, les savoirs-faire maison, la complexité intrinsèque et la réactivité aux besoins des clients. En fait, selon les études économiques les plus détaillées, confirmées par nombres de témoignages de directeurs d’entreprises, les investissements dans les brevets ont tendance en réalité à réduire les dépenses et à les détourner des investissements de R&D dans ce secteur.
La lettre du département des brevets de Nokia ressemble beaucoup, dans son style et son contenu, à (c5:la lettre des 5 PDG) de novembre dernier et au « Rapport commun de l’Industrie » d’avril 2003. L’avocat en chef des brevets de Nokia, Tim Frain, que nous avons auparavant identifié comme étant l’auteur de ces lettres, sollicite cette fois les signatures de PDG. Néanmoins sa lettre est écrite du point de vue d’un avocat en brevet attaché à une firme craignant une érosion de l’inportance qu’occupe le département des brevets dans une entreprise.
Réactions des parlementaires européens à la position du Groupe de travail du Conseil
Selon Nokia, il faut « féliciter » la Présidence irlandaise de « présenter un texte équilibré préservant les incitations à l’innovation en Europe dans des domaines aussi variés que les télécommunications, les technologies de l’information, l’électronique grand public, les appareils électroménagers, les transports et les appareils chirurgicaux tout en répondant à l’appel du Parlement pour des limitations garantissant que la brevetabilité ne s’étende pas à des domaines non techniques ou ne gêne pas excessivement l’interopérabilité dans notre société toujours plus connectée ».
De l’autre côté, James Heald, le coordinateur de la FFII britanique, affirme que le text eest en fait « le plus extrêmiste jamais vu, reprenant seulement les paragraphes pro-brevets de tous les autres text. Tous les amendements importants votés par le Parlement européne en septembre sont complètement igonrés. Le document de travail est délibérément aveugle face aux problèmes que le Parlement a tenté de résoudre. »
Ce point de vue est partagé par des parlementaires européens influents.
Piia-Noora Kauppi, députée européenne finlandaise du Parti populaire, exprime sa consternation face au dédain du Groupe de travail du Conseil envers la démocratie parlementaire :
Puisque le Conseil essaie de trouver un compromis avec le Parlement européen sur la proposition concernant la brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur (brevets logiciels), il devrait baser son travail sur la conclusion prise par le Parlement en session plénière et non sur les décisions de la Commission ou de la commission parlementaire Juridique. À en juger par les document produits jusqu’ici par le Groupe de travail du Conseil, il semblerait que le Conseil ne veuille pas prendre en compte la volonté des représentants démocratiquement élus de l’Europe.
Daniel Cohn-Bendit, co-président du groupe Verts/ALE ajoute :
Le Groupe de travail du Conseil a jusqu’ici complétement échouer à aborder les problèmes que les commissions parlementaires à la Culture et à l’Industrie avait essayé de résoudre. Ils se comportent comme la commission Juridique l’année dernière et on peut s’attendre à ce qu’ils échouent de la même manière.
Il est clair que les fonctionnaires nationaux des brevets au sein du Conseil ne veulent pas « d’harmonisation » ou de « clarification ». Ils veulent tout simplement garantir les intérêts de l’establishment des brevets. S’ils n’obtiennent pas ce qu’ils veulent, ils enterreront tout bonnement le projet de directive et essayeront de trouver d’autres moyens de venir à bout du droit existant, dont la clarté leur est si douloureuse.
Bent Hindrup Andersen, député du Mouvement de juin danois dans le Groupe EDD attire l’attention sur le manque de démocratie dans l’UE, qui est flagrant dans le comportement de la Commission et du Conseil :
L’approche de la Commission et du Conseil dans cette directive est choquante. Ils essaient par tous les moyens d’éluder la démocratie qu’apporte le Droit communautaire actuel. Tout d’abord, ils ont ignoré 94% des participants à leur propre consultation, sans jamais se justifier à part en affirmant que les 6% restants représentaient la « majorité économique ». Maintenant, ils négligent complètement le vote du Parlement européen et par la même occasion les avis du Conseil économique et social et du Conseil des régions. Ils agissent ainsi parce qu’ils ont l’habitude que cette tactique soit payante. L’UE s’est construite de cette façon. Des bureaucrates qui n’ont pas à rendre de compte deviennent ainsi les maîtres de la législation. Le problème est accentué par le manque complet de contrôle démocratique et d’équilibre dans le système européen de brevets. L’UE et les brevets se mélangent dans un cocktail particulièrement toxique. Les citoyens europ éen doivent de toute urgence reprendre à leur compte ce problème et en tirer les leçons avant qu’il soit trop tard. Ils ne devraient pas en particulier permettre à ce genre de structure de se perpétuer cette année avec la Constitution européenne.
15 parlementaires européens ont signé un Appel à l’action (même appellation que la circulaire de Nokia) soulignant que « des professionnels des brevets dans divers gouvernements et organisations tentent maintenant d’utiliser le Conseil des ministres de l’UE afin de se soustraire à la démocratie parlementaire au sein de l’Union euroépenne » et invitent le Conseil « à s’abstenir de présenter toute contre-proposition à la version du projet du Parlement Européen, à moins que cette contre-proposition n’ait été soutenue par un vote à la majorité du Parlement de l’État membre concerné ».
Le texte de la Présidence rejette l’interopérabilité
La FFII rit jaune devant la déclaration selon laquelle le texte proposé par l’Irlande ne « gênerait pas excessivement l’interopérabilité ».
Jonas Maebe, porte-parole belge de la FFII, explique :
La commission à l’Industrie, la commission Juridique, le Parlement européen en session plénière, ont tous demandé un disposition particulière pour permettre aux données d’être converties et échangées entre différents systèmes et plates-formes logicielles. Sinon, les entreprises pourraient utiliser les brevets logiciels pour bloquer les données des utilisateurs à double tour dans un programme ou un système d’exploitation particulier et la concurrence serait impossible.
C’est un problème récurrent. Chaque niche de marché est individuellement menacée. C’est pourquoi, dans le vote final en septembre, le Parlement européen a voté pour cette disposition par 393 voix contre 35.
Mais selon Nokia, le Groupe de travail du Conseil a « répondu » à l’appel du Parlement européen, doc tout va bien. Et comment (malgré une dernière opposition rejetée de la délégation luxembourgeoise) le Groupe de travail a-t-il proposé de répondre ? En supprimant intégralement la clause du Parlement européen et en la remplaçant par un considérant qui stipule que tout problème doit être confié aux lois antit-trust existantes.
Rappelons que c’est une loi anti-trust qui n’a duré « que » quatre ans, avec des coûts exorbitants, afin de poursuivre une « seule » entreprise accusée, Microsoft ; lequel Microsoft a déclaré qu’il était prêt à poursuivre en appel pendant encore quatre ans ; et qui en fin de compte a l’air d’aboutir à ce que l’affaire soit tranquillement arrangée par un accord de licences croisée entre Microsoft et Sun, sans que Samba (un projet en logiciel libre/open source qui implémente un partage de fichier et d’impression compatible avec Windows, recommandé et utilisé à des fins d’interopérabilité par des entreprises comme IBM, HP et Apple) n’ait été invité à la fête.
On commence à se demander dans quel genre de monde féérique vivent ces personnes.
Grève en ligne, rassemblements, conférences
Pendant ce temps, la FFII mobilise ses 50 000 supporters et les 300 000 signataires de la pétition pour manifester à la fois sur Internet et à Bruxelles le 14 avril.
Le site http://demo.ffii.org fournit de nombreux exemples de pages de grève et des bandeaux que les webmestres peuvent utiliser pour soutenir cette action.
Les manifestations de Bruxelles s’ouvriront sur une conférence de presse au Parlement européen, salle AG2, le 14 avril à 10 heures. Les manifestants se rassembleront à 11:30 près du Parlement. Ils porteront des tshirts avec les slogans « No Software Patents — Power to the Parliament » (Non aux brevets logiciels - Le pouvoir au Parlement). Des discours et spectacles auront lieu.
La manifestation sera suivie par une conférence interdisciplinaire au Parlement européen, toujours salle AG2, à 14 heures. Parmis les participants à ce débat scrupuleusement préparé se trouvent des memebres du Parlement européen, des fonctionnaires de la Commission européenne, du Groupe de travail du Conseil et de l’Office européen des brevets, des développeurs de logiciels, des économistes et des avocats de diverses écoles de pensée.
voir Programme des manifestations de Bruxelles
Jusqu’à présent, plus de 200 participants se sont inscrits à la FFII pour la conférence.
D’autres grèves en ligne et conférences dans diverses capitales européenne auront lien durant les mois précédant les élections du Parlement européen qui se tiennent du 10 au 13 juin, en particulier pendant la semaine du Jour de l’europe, le 9 mai.
voir (Local Action Days 2004/05/08-12->http://swpat.ffii.org/dates/2004/de...]
Contacts media
- courriel :
media at ffii org - tél :
- Hartmut Pilch +49-89-18979927 (Allemand/Anglais/Français)
- Benjamin Henrion +32-498-292771 (Français/Anglais)
- Jonas Maebe +32-485-36-96-45 (Néerlandais/Anglais/Français)
- Dieter Van Uytvanck +32-499-16-70-10 (Néerlandais/Anglais/Français)
- Erik Josefsson +46-707-696567 (Suédois/Anglais)
- James Heald +44 778910 7539 (Anglais)
Plus de contacts peuvent être fournis sur simple demande
À propos de la FFII — www.ffii.org
L’Association pour une infrastructure informationnelle libre (FFII) est une association à but non lucratif enregistrée à Munich, ayant pour objet de promouvoir les savoirs dans le domaine du traitement des données. La FFII soutient le développement de biens informationnels publics fondés sur les droits d’auteur, la libre concurrence et les standards ouverts. Plus de 250 membres, 300 sociétés et 15 000 adhérents ont chargé la FFII de représenter leurs intérêts dans le domaine de la législation sur les droits de propriété attachés aux logiciels.