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2004-05-18 Accord politique du Conseil de l’Union européenne
mardi 18 mai 2004
Suite aux travaux du Groupe de travail « Propriété intellectuelle (brevets) » et du Comité des représentants permanents (COREPER), les ministres du Conseil « Compétitivité » ont trouvé un accord de « compromis » politique, qu’il reste à ratifier pour devenir l’avis final du Conseil en 1re lecture.
Proposition de DIRECTIVE DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL concernant la brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur [Déclaration de la Commission à inscrire au procès-verbal de la session du Conseil au cours de laquelle la position commune sera adoptée : « La Commission estime que l’article 6, lu en liaison avec le considérant 18, autorise tout acte décrit aux articles 5 et 6 de la directive 91/250/CEE concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur, y compris tout acte nécessaire à l’interopérabilité, sans que l’autorisation du titulaire du droit de brevet soit nécessaire. »]
Considérant 1
La réalisation du marché intérieur implique que l’on élimine les restrictions à la libre circulation et les distorsions de concurrence, tout en créant un environnement favorable à l’innovation et à l’investissement. Dans ce contexte, la protection des inventions par des brevets est un élément essentiel du succès du marché intérieur. Une protection effective, transparente et harmonisée des inventions mises en oeuvre par ordinateur dans tous les États membres est essentielle pour maintenir et encourager les investissements dans ce domaine.
Considérant 2
Des différences existent dans la protection des inventions mises en oeuvre par ordinateur conférée par les pratiques administratives et la jurisprudence des États membres. Ces différences pourraient créer des entraves aux échanges et faire ainsi obstacle au bon fonctionnement du marché intérieur.
Considérant 3
De telles différences résultent du fait que les États membres adoptent de nouvelles pratiques administratives qui diffèrent les unes des autres ou du fait que les jurisprudences nationales interprétant la législation actuelle évoluent différemment. Ces différences pourraient prendre de l’ampleur avec le temps.
Considérant 4
La diffusion et l’utilisation croissantes de programmes d’ordinateur dans tous les domaines de la technique et les moyens de diffusion mondiale via l’Internet sont un facteur critique de l’innovation technologique. Il convient donc de veiller à ce que les développeurs et les utilisateurs de programmes d’ordinateur dans la Communauté bénéficient d’un environnement optimal.
Considérant 5
En conséquence, les règles de droit régissant la brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur doivent être harmonisées de manière à ce que la sécurité juridique qui en résultera et le niveau des critères de brevetabilité permettent aux entreprises innovatrices de tirer le meilleur parti de leur processus inventif et stimulent l’investissement et l’innovation. La sécurité juridique est également assurée par le fait que, en cas de doute quant à l’interprétation de la présente directive, les juridictions nationales ont la possibilité, et les juridictions nationales de dernière instance l’obligation, de demander à la Cour de justice de statuer.
Considérant 6
La Communauté et ses États membres sont liés par l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), approuvé par la décision 94/800/CE du Conseil du 22 décembre 1994 relative à la conclusion, au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) [JO L 336 du 23.12.1994, p. 1.]. L’article 27, paragraphe 1, de l’accord sur les ADPIC dispose qu’un brevet pourra être obtenu pour toute invention, de produit ou de procédé, dans tous les domaines techniques, à condition qu’elle soit nouvelle, qu’elle implique une activité inventive et qu’elle soit susceptible d’application industrielle. En outre, selon l’accord sur les ADPIC, des brevets peuvent être obtenus et des droits de brevet exercés sans discrimination quant au domaine technologique. Ces principes devraient donc s’appliquer aux inventions mises en oeuvre par ordinateur.
Considérant 7
En vertu de la Convention sur la délivrance de brevets européens, signée à Munich le 5 octobre 1973, et du droit des États membres en matière de brevets, les programmes d’ordinateur ainsi que les découvertes, théories scientifiques, méthodes mathématiques, créations esthétiques, plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles, en matière de jeu ou dans le domaine des activités économiques et les présentations d’informations, ne sont pas considérés comme des inventions et sont donc exclus de la brevetabilité. Cette exception ne s’applique cependant et n’est justifiée que dans la mesure où la demande de brevet ou le brevet concerne ces objets ou ces activités en tant que tels parce que lesdits objets et activités en tant que tels n’appartiennent à aucun domaine technique.
Considérant 7 bis
(Supprimé, son texte étant intégré dans l’article 4 bis).
Considérant 7 ter
La présente directive vise à éviter des divergences d’interprétation des dispositions de la Convention sur le brevet européen relatives aux limites de la brevetabilité. La sécurité juridique qui en découle devrait contribuer à créer un climat propice aux investissements et à l’innovation dans le domaine des logiciels.
Considérant 8
La protection par brevet permet aux innovateurs de tirer profit de leur créativité. Les droits de brevet protègent l’innovation dans l’intérêt de la société dans son ensemble mais ils ne devraient pas être utilisés d’une manière anticoncurrentielle.
Considérant 9
Conformément à la directive 91/250/CEE du Conseil du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateurs [JO L 122 du 17.5.1991, p. 42 - directive modifiée par la directive 93/98/CEE (JO L 290 du 24.11.1993, p. 9).], toute expression d’un programme d’ordinateur original est protégée par un droit d’auteur en tant qu’oeuvre littéraire. Toutefois, les idées et principes qui sont à la base d’un élément, quel qu’il soit, d’un programme d’ordinateur ne sont pas protégés par le droit d’auteur.
Considérant 10
Pour être considérée comme brevetable, une invention doit présenter un caractère technique et donc appartenir à un domaine technique.
Considérant 11
D’une manière générale, pour répondre au critère de l’activité inventive, les inventions doivent apporter une contribution technique à l’état de l’art.
Considérant 12
En conséquence, bien que les inventions mises en oeuvre par ordinateur appartiennent à un domaine technique, lorsqu’une invention n’apporte pas de contribution technique à l’état de l’art, parce que, par exemple, la contribution en question ne revêt pas un caractère technique, elle ne répond pas au critère de l’activité inventive et n’est donc pas brevetable.
Considérant 13
(Supprimé)
Considérant 13 bis
[...] La simple mise en oeuvre d’une méthode par ailleurs non brevetable sur un appareil tel qu’un ordinateur n’est pas en elle-même suffisante pour considérer qu’il y a contribution technique. En conséquence, une méthode mise en oeuvre par ordinateur pour l’exercice d’une activité économique, une méthode de traitement des données, ou une autre méthode, dans laquelle la seule contribution à l’état de l’art ne présente pas de caractère technique, ne peut pas constituer une invention brevetable.
Considérant 13 ter
Si la contribution à l’état de l’art porte uniquement sur un sujet non brevetable, il ne peut y avoir invention brevetable, indépendamment de la façon dont le sujet est présenté dans les revendications. Ainsi, l’exigence d’une contribution technique ne peut être contournée uniquement en spécifiant des moyens techniques dans la revendication de brevet.
Considérant 13 quater
En outre, un algorithme ne présente pas, en soi, de caractère technique et ne peut donc constituer une invention technique. Une méthode recourant à un algorithme peut néanmoins être brevetable, dans la mesure où elle est utilisée pour résoudre un problème technique. Toutefois, tout brevet accordé pour cette méthode ne doit pas établir un monopole sur l’algorithme lui-même ou sur son utilisation dans des contextes non prévus par le brevet.
Considérant 13 quinquies
Le champ d’application des droits exclusifs conférés par tout brevet est défini par les revendications, qui sont interprétées compte tenu de la description et des éventuels dessins. Il convient que les inventions mises en oeuvre par ordinateur soient au moins revendiquées en faisant référence à un produit, tel qu’un appareil programmé, ou à un procédé réalisé sur un tel appareil. En conséquence, lorsque des éléments individuels de logiciel sont utilisés dans des contextes qui ne comportent pas la réalisation d’un produit ou d’un procédé faisant l’objet d’une revendication valable, cette utilisation ne doit pas constituer une contrefaçon de brevet.
Considérant 14
La protection juridique des inventions mises en oeuvre par ordinateur ne nécessite pas l’établissement d’une législation distincte en lieu et place des dispositions du droit national en matière de brevets. Les règles du droit national continuent de former la base de référence de la protection juridique des inventions mises en oeuvre par ordinateur. La présente directive clarifie simplement la situation juridique actuelle, en vue d’assurer la sécurité juridique, la transparence et la clarté de la législation et d’éviter toute dérive vers la brevetabilité de méthodes non brevetables, telles que des procédures évidentes ou non techniques et des méthodes destinées à l’exercice d’activités économiques.
Considérant 15
La présente directive devrait se borner à fixer certains principes s’appliquant à la brevetabilité de ce type d’inventions, ces principes ayant notamment pour but d’assurer que les inventions appartenant à un domaine technique et apportant une contribution technique peuvent faire l’objet d’une protection et inversement d’assurer que les inventions qui n’apportent pas de contribution technique ne peuvent bénéficier d’une protection.
Considérant 16
La position concurrentielle de l’industrie européenne vis-à-vis de ses principaux partenaires commerciaux sera améliorée si les différences actuelles dans la protection juridique des inventions mises en oeuvre par ordinateur sont éliminées et si la situation juridique est transparente. Étant donné la tendance actuelle, qui voit l’industrie manufacturière traditionnelle déplacer son activité vers des économies où les coûts sont faibles à l’extérieur de l’Union européenne, l’importance de la protection de la propriété intellectuelle, et en particulier de la protection assurée par le brevet, est évidente.
Considérant 17
Les dispositions de la présente directive sont sans préjudice de l’application des articles 81 et 82 du traité, en particulier lorsqu’un fournisseur occupant une position dominante refuse d’autoriser l’utilisation d’une technique brevetée nécessaire à la seule fin d’assurer la conversion des conventions utilisées dans deux systèmes ou réseaux informatiques différents de façon à permettre entre eux la communication et l’échange de données.
Considérant 18
Les droits conférés par les brevets d’invention délivrés dans le cadre de la présente directive ne portent pas atteinte aux actes permis en vertu des articles 5 et 6 de la directive 91/250/CEE concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur par un droit d’auteur, notamment en vertu des dispositions particulières relatives à la décompilation et à l’interopérabilité. En particulier, les actes qui, en vertu des articles 5 et 6 de ladite directive, ne nécessitent pas l’autorisation du titulaire du droit, au regard des droits d’auteur de ce titulaire afférents ou attachés à un programme d’ordinateur, et qui, en l’absence desdits articles, nécessiteraient cette autorisation, ne doivent pas nécessiter l’autorisation du titulaire du droit, au regard des droits de brevet de ce titulaire afférents ou attachés au programme d’ordinateur.
Considérant 19
Dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée, à savoir harmoniser les règles nationales sur les inventions mises en oeuvre par ordinateur, ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire, la Communauté est en droit d’adopter des mesures conformément au principe de subsidiarité prévu à l’article 5 du traité. Conformément au principe de proportionnalité, tel qu’énoncé dans cet article, la présente directive ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs fixés,
Article 1 - Champ d’application
La présente directive établit des règles concernant la brevetabilité des inventions mises en oeuvre par ordinateur.
Article 2 - Définitions
Aux fins de la présente directive, les définitions suivantes s’appliquent :
a) « invention mise en oeuvre par ordinateur » désigne toute invention dont l’exécution implique l’utilisation d’un ordinateur, d’un réseau informatique ou d’un autre appareil programmable, l’invention présentant une ou plusieurs caractéristiques qui sont réalisées totalement ou en partie par un ou plusieurs programmes d’ordinateur ;
b) « contribution technique » désigne une contribution à l’état de l’art dans un domaine technique, qui est nouvelle et non évidente pour une personne du métier. La contribution technique est évaluée en prenant en considération la différence entre l’état de l’art et l’objet de la revendication de brevet considéré dans son ensemble qui doit comprendre des caractéristiques techniques, qu’elles soient ou non accompagnées de caractéristiques non techniques.
Article 3 - Inventions mises en oeuvre par ordinateur en tant que domaine technique
Supprimé
Article 4 - Conditions de brevetabilité
Pour être brevetable, une invention mise en oeuvre par ordinateur doit être susceptible d’application industrielle, être nouvelle et impliquer une activité inventive. Pour impliquer une activité inventive, une invention mise en oeuvre par ordinateur doit apporter une contribution technique.
Article 4 bis - Exclusions de brevetabilité
Un programme d’ordinateur en tant que tel ne peut constituer une invention brevetable.
Une invention mise en oeuvre par ordinateur n’est pas considérée comme apportant une contribution technique simplement parce qu’elle implique l’utilisation d’un ordinateur, d’un réseau ou d’un autre appareil programmable. En conséquence, ne sont pas brevetables les inventions consistant en des programmes d’ordinateur, qu’ils soient exprimés en code source, en code objet ou sous toute autre forme, qui mettent en oeuvre des méthodes pour l’exercice d’activités économiques, des méthodes mathématiques ou d’autres méthodes, si ces inventions ne produisent pas d’effets techniques au-delà des interactions physiques normales entre un programme et l’ordinateur, le réseau ou un autre appareil programmable sur lequel celui-ci est exécuté.
Article 5 - Forme des revendications
Les États membres veillent à ce qu’une invention mise en oeuvre par ordinateur puisse être revendiquée en tant que produit, c’est-à-dire en tant qu’ordinateur programmé, réseau informatique programmé ou autre appareil programmé ou en tant que procédé réalisé par un tel ordinateur, réseau informatique ou autre appareil à travers l’exécution d’un logiciel.
Une revendication pour un programme d’ordinateur, seul ou sur support, n’est autorisée que si ce programme, lorsqu’il est chargé et exécuté dans un ordinateur, un réseau informatique programmé ou un autre appareil programmable, met en oeuvre un produit ou un procédé revendiqué dans la même demande de brevet, conformément au paragraphe 1.
Article 6 - Relation avec la directive 91/250/CEE
Les droits conférés par un brevet délivré pour une invention relevant du champ d’application de la présente directive n’affectent pas les actes autorisés en vertu des articles 5 et 6 de la directive 91/250/CEE concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur par un droit d’auteur, et notamment de ses dispositions relatives à la décompilation et à l’interopérabilité.
Article 7 - Suivi
La Commission surveille l’incidence des inventions mises en oeuvre par ordinateur sur l’innovation et la concurrence en Europe et dans le monde entier, ainsi que sur les entreprises européennes, en particulier les petites et moyennes entreprises et la communauté des logiciels libres, de même que le commerce électronique.
Article 8 - Rapport sur les effets de la directive
La Commission présente au Parlement européen et au Conseil, pour le [trois ans à compter de la date indiquée à l’article 9, paragraphe 1] au plus tard, un rapport indiquant :
a) l’incidence des brevets délivrés pour des inventions mises en oeuvre par ordinateur sur les éléments mentionnés à l’article 7 ;
b) si les règles régissant la durée de validité et la détermination des critères de brevetabilité en ce qui concerne plus précisément la nouveauté, l’activité inventive et la portée des revendications sont adéquates, et s’il serait opportun et juridiquement possible, compte tenu des obligations internationales de la Communauté, d’apporter des modifications à ces règles ;
c) si des difficultés sont apparues dans les États membres où les aspects de la nouveauté et de l’activité inventive des inventions ne sont pas examinés avant la délivrance d’un brevet et si des mesures doivent être prises, le cas échéant, pour y remédier ;
c bis) si des difficultés sont apparues dans la relation entre la protection par brevet des inventions mises en oeuvre par ordinateur et la protection des programmes d’ordinateur par le droit d’auteur, prévue par la directive 91/250/CEE, et si des abus du système de brevet se sont produits en rapport avec les inventions mises en oeuvre par ordinateur ;
c ter) la façon dont les exigences de la présente directive ont été prises en compte dans la pratique de l’Office européen des brevets et dans ses lignes directrices en matière d’examen ;
c quater) à quels égards il pourrait être nécessaire de préparer une conférence diplomatique afin de réviser la Convention sur le brevet européen ;
c quinquies) l’incidence des brevets conférés pour des inventions mises en oeuvre par ordinateur sur le développement et la commercialisation de programmes et de systèmes informatiques interopérables ;
d) Supprimé.
Article 8 bis
La Commission évalue l’incidence de la présente directive à la lumière du suivi réalisé conformément à l’article 7 et du rapport à rédiger conformément à l’article 8 et présente, si nécessaire, au Parlement européen et au Conseil des propositions en vue de modifier la législation.
Article 9 - Mise en oeuvre
Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le [vingt-quatre mois après son entrée en vigueur]. Ils en informent immédiatement la Commission.
Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.
Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions de droit interne qu’ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive.