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Dangers des brevets logiciels pour les petites et moyennes entreprises

mercredi 12 janvier 2005, par Gérald Sédrati-Dinet (gibus)

Ce sont les petites et moyennes entreprises qui souffriraient le plus d’une légalisation des brevets logiciels. Elles prendraient sur elles tout le poids de leurs aspects négatifs sans même qu’on leur laisse une chance d’en tirer un profit significatif.

L’industrie européenne des logiciels est principalement constituée de petites et moyennes entreprises (PME). Pourtant, le système des brevets en général a une réputation de progressivement mettre les PME en position désavantageuses dans tous les domaines. Les problèmes sont encore pires dans le domaine du logiciel. Ainsi, l’Europe se tirerait elle même une balle dans le pied si elle fragilisait les PME et renforçait les géants du logiciel extra européens.

Certaines grandes sociétés veulent pouvoir limiter ou même écraser les petits concurrents comme bon leur semble. Dans le domaine du logiciel, même la plus petite entreprise peut potentiellement transformer une grande idée en un produit réussi parce que les besoins en capitaux sont relativement modérés. Les brevets logiciels vont forcer les petites entreprises à acquérir elles-mêmes des brevets coûteux et ce faisant à gonfler artificiellement les besoins en capitaux du développement de logiciels. Le plus grand problème est que les petites entreprises ne peuvent pas utiliser les brevets de manière efficace contre les grandes sociétés mais doivent toujours craindre qu’un concurrent plus important leur cause de sérieux ennuis à l’aide du système des brevets.

Les PME sont des fournisseurs décisifs d’innovations révolutionnaires mais seraient les plus défavorablement touchées par la brevetabilité. La majorité d’entre elles est dissuadée par les coûts intrinsèques des brevets, mais sera obligée de sillonner entre les portefeuilles de brevets logiciels des grandes sociétés.

Deutsche Bank Research

Les PME n’ont pas accès aux accords de licences croisées.Seules les grandes sociétés avec des milliers ou des dizaines de milliers de brevets sont en position de négocier des accords de licences croisées avec leur homologues. Le risque est grand que la majorité des parts de marché du logiciel appartienne finalement un petit cartel de superpuissances des brevets. Certaines grandes entreprises voudraient faire de la possession d’un énorme arsenal de brevets une exigence afin d’être compétitif sur le marché. Les PME n’ont aucune chance d’acquérir un jour des portefeuilles de brevets de cette taille-là. Le « volume critique » d’un portefeuille de brevets se compte en milliers. Vous devez en posséder assez pour que personne n’ait même plus envie d’y jeter un œil.

Les PME perdent beaucoup de leur valeur boursière au profit de la « mafia des brevets ».Même les grandes sociétés ont leurs propres problèmes avec les profiteurs de brevets qui ne produisent rien mais peuvent typiquement trouver un arrangement dans n’importe quelle situation par un payement forfaitaire. Les PME sont très souvent obligées de faire des accords de partage de revenus selon lesquels elles doivent donner un certain pourcentage de leur ventes et/ou de leur profits à un profiteur de brevets. Si une entreprise faisant une marge de 20% hors taxes doit donner 2% de ses ventes à un extorqueur, elle cédera un dixième de ces profits !

Reback raconte souvent l’histoire sur la façon dont un groupe d’avocats d’IBM sont allés chez Sun Microsystems Inc. dans les années 80 et ont accusé l’entreprise, alors à son commencement, de transgresser 7 de leurs brevets. Après que les ingénieurs de Sun ont expliqué pourquoi ils ne les transgressaient pas, les avocats de IBM ont répondu qu’avec 10 000 brevets ils étaient certains de trouver une infraction quelque part.

The Washington Post

Une nouvelle tendance est celle des « taxes de brevets » imposées par les grandes entreprises comme IBM et Microsoft aux PME. IBM se vente de soutirer la somme d’un milliard de dollars chaque année grâce aux « concessions de licence à des tiers » de son portefeuille de brevets. Ces accords fonctionnent de la manière suivante : IBM possède actuellement environ 40 000 brevets mondiaux. Personne, et particulièrement aucune PME, n’a l’occasion de vérifier tous ces brevets et s’assurer qu’il n’y a pas de conflit entre ses produits et les nombreux brevets de IBM. IBM approche alors les entreprises et leur offre un accord de licences coûteux pour l’intégralité de ses brevets. Grâce à ces accords, IBM non seulement soutire à la petite entreprise son l’argent mais également l’accès à des informations confidentielles sur son business. Au printemps 2004, la presse a commencé à rapporter que Microsoft faisait maintenant la même chose. Microsoft a déjà contacté environ une centaine d’entreprises, dont certaines sont européennes, et a déclaré que les entreprises de logiciel libre seraient également visées.